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Caliméro président ! 27 mars, 2014
Mon cher journal,
Je sais, ça fait longtemps que je ne t’ai pas ouvert, mais j’ai été plus occupé qu’un unijambiste dans un concours de bottage de culs.
On a super bien surfé, en 2012. On le sentait bien, que c’était notre tour, faut dire. Ouais, ça se sentait, que les gens en avaient marre d’une politique de droite dont ils sentaient qu’elle les étouffait à petit feu. Et ça se sentait aussi, cet espoir chez eux qu’une politique de gauche était peut-être la solution pour les gagne-petit, pour cette inquiétude sourde quant à l’environnement (faut dire aussi que les conséquences de la surconsommation sans souci du lendemain commencent à se voir, et pas que des élites. On a tout fait, tous horizons politiques confondus, pour retarder la prise de conscience, mais là, on n’arrive plus à le cacher. Si ça se trouve, on va même devoir finir par agir).
Bon, moi, c’était pas prévu que j’en arrive là, hein, à l’Élysée, je veux dire… Cette histoire du sofitel m’a rudement aidé. (Note pour plus tard : penser à ériger un monument à la gloire de cette soubrette)
Je n’ai tellement pas une tête de vainqueur que j’ai pu bénéficier des seules et uniques conditions pour devenir président : que les électeurs se retrouvent à devoir voter, non pas pour moi, mais contre mon adversaire. (Note pour plus tard : penser à envoyer un cadeau de remerciement à Sarkozy)
Enfin, bon, on est arrivé au pouvoir, et là, figure-toi qu’il a fallu se mettre au boulot ! Non mais tu imagines le culot des gens ? Pfff… Donc, on s’y met, on fait des trucs, et parfois aussi leur contraire, on fait not’ p’tit bonhomme de ch’min, quoi. Et tu sais quoi ? Là, on s’est pris une déculottée aux municipales ! Si, je te jure !
Moi, je ne comprends pas cette réaction. Je ne comprends pas que les gens qui nous ont élus pour avoir une politique de gauche soient mécontents de la nôtre. Et pourquoi ? Juste parce qu’elle n’est pas de gauche ! Ils sont d’un sourcilleux, c’est décourageant…
M’enfin, c’est tout de même logique de favoriser le grand patronat plutôt que le populo ! Il s’imagine quoi, le populo ? Que c’est lui qu’on fréquente au quotidien ? Ben nan ! On ne coudoie pas le miséreux, et même pas le smicard (quoique c’est quasi pareil, maintenant), nous. Nan. On a des sous, parce qu’on est au pouvoir depuis un p’tit bail, alors on fréquente des gens qui ont des sous. C’est logique, enfin ! Si tu avais le choix entre donner un coup de main à des gens que tu fréquentes et des gens que tu ne vois qu’en périodes électorales, tu ferais quoi, toi ? Ben voilà. Moi pareil. Et même les électeurs, ils en feraient autant, à ma place. Si on leur laisse le choix entre aider un riche et aider un collègue, ils vont aider le collègue. C’est bien pour ça que ce sont les petits revenus qui donnent le plus aux associations caritatives. Les cons.
[...]
Excuse-moi, cher journal. Je riais tellement que je n’arrivais plus à écrire. Pfiou !
Vraiment tous des crétins, ces électeurs. Regarde : ils veulent des actions en faveur de l’emploi et de la réinsertion, et voilà-t-y pas qu’il s’en trouve pour protester parce que la droite et la gauche ont adoubé des candidats qui ont été convaincus de malversations ! Faudrait savoir, hein ! Encore, la droite, ça s’est plutôt bien passé : plusieurs repris de justice ont été réélus dès le premier tour. Mais chez nous, ah pardon ! Paraît qu’en étant de gauche, il faut faire montre des valeurs morales que notre électorat tient en estime ! Mais merde, à la fin ! Alors voilà, on décide d’être de gauche, et pouf, on ne doit pas être malhonnête ?
Je te jure, cher journal, j’en ai ras le scooter de ces caprices. D’ailleurs, je l’ai montré, cette semaine : normalement, j’aurais dû remanier mon gouvernement, pour montrer aux électeurs qu’ils ont été entendus. J’aurais dû demander à quelqu’un ouvertement de gauche de devenir mon premier ministre, choisir une vraie politique de gauche, virer Valls, notre Sarkozy à nous. Prendre Mélenchon comme premier ministre, tiens ! Huhuhu… Eh ben nan ! Je changerai de gouvernement après le second tour ! Voilà, c’est bien fait pour eux ! Merde, alors, c’est moi, le patron, nan ? J’ai presque envie de demander à Ségolène de remplacer Jean-Marc ; ça leur fera les pieds. Et puis, ça me permettra de me retrouver en première page des journaux people. J’aime bien ça, c’est marrant.
Eh ben tu sais quoi ? Ils sont encore foutus de mal le prendre, et nous remettre une pâtée dimanche. Moi, j’en ai marre. Les électeurs, c’est tous des cons. Rien que des cons.
C’est vraiment trop injuste.